Changement de la mention du sexe pour une personne trans’ mineure

Le 29 mars 2022, le GIAPS a organisé son premier webinaire -à destination des associations d’autosupport et des professionnel·le·s du droit et de la médecine -consacré aux procédures juridiques de modification des prénoms et de mention du sexe à l’état civil pour les personnes trans’ mineures.

Vous étiez plus d’une soixantaine à l’avoir suivi : merci !

À l’occasion de ce séminaire, nous avons présenté la décision rendue par la Cour d’appel de Chambéry, le 25 janvier 2002, et qui accorde le changement de la mention du sexe à un mineur non émancipé. Une grande première, à notre connaissance !

Dans cette affaire, les deux parents d’un mineur trans’ ont introduit une requête auprès de juge afin de demander à ce que leur enfant, né en 2004, puisse changer la mention de son sexe à l’état civil.

Pour faire droit à la demande, les juges procèdent en deux temps :

  • d’abord, ils regardent la recevabilité de la demande dans la mesure où les articles 61-5 et suivants du code civil issus de la loi du 18 novembre 2016 ne visent explicitement que « les majeurs et mineurs émancipés ». Au terme d’un contrôle de conventionnalité, il est ainsi jugé que « l’interdiction pour les mineurs non émancipés d’agir en modification de l’état civil telle que découlant des dispositions de l’article 61-5 du code civil ne permet pas de garantir en l’espèce ce le droit d[u mineur] au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme. Elles doivent dès lors être considérées comme portant une atteinte disproportionnée à ses droits en l’obligeant à révéler son parcours personnel particulier du fait notamment de la mention de son genre féminin qui sera portée sur ses diplômes sanctionnant la fin de sa scolarité » (diplôme du baccalauréat).
  • ensuite, une fois la requête jugée recevable, les juges tranchent le litige au fond en examinant si la demande répond aux critères de changement de la mention du sexe à l’état civil. Dans cette affaire, le mineur « remplit l’ensemble des critères retenus par l’article 61-5 du code civil et notamment qu’il a changé de prénom suivant mention portée sur son acte de naissance en date du 3 juillet 2019; qu’il est intégré sous son identité masculine dans ses milieux familiaux, scolaires et sociaux, tel que cela ressort des photographies et attestations versées aux débats; qu’il est identifié sous son identité masculine qui est en concordance avec son apparence physique d’autant plus qu’il a entamé un traitement hormonal en parallèle de sa prise en charge médicale et psychologique ».

Cette décision est, à notre connaissance, une première -qu’il convient de saluer : à l’issue d’un contrôle de conventionnalité et en faisant application des critères définis aux articles 61-5 du code civil, elle permet à un mineur trans’ de changer de mention du sexe à l’état civil.

Elle n’est toutefois pas exempte de critiques et des interrogations demeurent :

  • les juges refusent d’appliquer le droit en matière d’autorité parentale et de reconnaître que les parents, représentants légaux de leurs enfants mineurs, puissent faire la demande de changement de la mention du sexe à l’état civil pour lui. Ce n’est qu’à l’issue du contrôle de conventionnalité que la demande est jugée recevable. Au GIAPS, nous estimons que l’absence de mention des « mineurs » n’équivaut pas à une interdiction et qu’il convient de continuer à plaider pour l’application de cette lecture du droit !
  • par ailleurs, le dossier était très bon : le mineur, âgé de 17 ans et demi, remplissait effectivement tous les critères posés par l’article 61-5 du code civil. Aussi, lui opposer une interdiction absolue de changer de mention du sexe constituerait bien une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et ce d’autant plus qu’il est sur le point de passer le baccalauréat (diplôme qui porte mention du genre de la personne à travers Madame/Monsieur). Qu’en serait-il si le mineur avait été plus jeune ? L’argument relatif au diplôme tiendrait-il s’il s’agissait du brevet ?
  • qu’est-ce qui se serait aussi passé si les parents n’avaient pas été soutenant ? voire en conflit ?

Autant de questions encore sans réponse !

Un dossier-guide permettant de vous accompagner dans une demande de changement de la mention du sexe pour une personne mineure est désormais en ligne sur notre site internet.

Publié par association.giaps

Groupe d'information et d'action sur les questions procréatives et sexuelles

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